La générosité du désordre
La série La générosité du désordre appartient au deuxième groupe de séries. Celui-ci parle symboliquement des liens que bâtissent entre eux les matières, les êtres vivants pour construire, imaginer, des entités plus complexes. Ceci toujours dans un esprit qui rend compte de leur faculté d'adaptation, de création, de cette volonté de jouer avec les formes et les structures. Ainsi, la série La générosité du désordre raconte-t-elle, entre la réalité et la fiction poétique, l'apparition de l'arbre à partir de buissons emmêlés.
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La série La générosité du désordre est publiée intégralement dans l'ouvrage La forêt sur le vif, 21x16cm, 92p, 4 textes, 57 photographies, 15 euros.
La générosité du désordre (extraits du texte et de la série photographique)
Le commencement, l'amorce.
Se situer à l'amorce.
La rechercher, voir, entendre
se coucher et sentir la Terre
la ressentir, approcher sa richesse
tout ce qui est mis en avant, qui tend les choses...
(...)
(...)
La feuille, la tige.
La tige est une respiration, un discours qui se creuse.
Elle a le mouvement, la grâce, la ténacité.
Elle assemble l'espace, le griffe, le chatouille, le stimule, l'enveloppe.
Elle ronge le temps, le défie à la course
et son allongement amasse peu à peu le futur qu'elle vise
ce déploiement têtu en recherche de tout.
La tige, un concentré, une expansion sans gravité
un défi sans pesanteur qui se multiplie seul d'un désir d'horizon.
Une, deux tiges, puis cette multitude prête qui referme le cercle
où se crée et se berce
où s'invente et se retranche
les particules assemblées, les poussées qui respirent
la lignine savante, les flots de sève excitée.
Les tiges sont cocons, nids, mères attentives.
Elles veillent, couvent les germes placentaires des plantes à venir
des arbres à venir
là où le souffle se faufile, s'anime sans un cri.
Les arbres qui croissent de silence accumulé.
Morceau après morceau.
Bout de bois après bout de bois.
Dans l'entrelacs, les nœuds lâches des fibres emmêlées.
(...)
(...)
Je veux croire en cela.
A cette vigueur aigüe qui anime les forêts
à ce plein jamais las qui veille sur les êtres
à ce vivant fier et droit qui plonge dans la luxuriance, le renouveau et la continuité.
Je veux croire en cette magie prolifique et sacrée.
Je veux sentir cela au ras de ma peau, de mes yeux, de mes songes.
Me sentir lié, emmêlé, dans le grave des branches et le souple des lianes.
Je veux vivre et y vivre, sans rien penser d'autre qu'à la présence folle de cette poussée vertigineuse qui construit la force et la hauteur.
Être arbre dans un jaillissement
pour le jaillissement et la démesure
des désordres grandioses.