frissons
Frissons
La série Frissons appartient au premier groupe. Ce groupe est axé sur la connaissance et la description des matières et des structures: l'eau, les roches, le tissu végétal.... Elles sont souvent décrites comme adoptant des formes qui suggèrent la présence d'êtres particuliers ou des phénomènes plus complexes. Ainsi dans la série Frissons l'eau adopte-t-elle des structures qui sont parfois proches de celles présentes chez certains animaux, peau, tissus cellulaires, carapaces...
Pour avoir une vision complète de la démarche suivie dans ce blog, se référer à la page DEMARCHE dans la colonne de droite.
La série Frissons est publiée sous forme de carnet 20x25cm, 36p, avec texte d'introduction et 20 photographies, 15 euros.
Frissons (extraits du texte et de la série photographique)
Des choses entrevues... La surface ondule calmement, indécise. La surface s’avance, se retire, retire du regard, nous manque soudain. Puis s’approche à nouveau, dévoile en avant ces choses disparues. Qui disparaissent encore...
Parfois on ne voit rien. Le regard prend alors la nonchalance d’une surface lisse où rien ne s’imprime, rien ne s’exprime. La mer s’oublie dans un point de vue aveugle.
Parfois tout recommence mais si l'on est moins attentif, moins attentionné, les gestes de la mer ne reposent que sur du déterminé, du répétitif creux, comme si, de façon sous-jacente, elle ne se rassemblait qu'autour d’un goût établi pour le rien ou le connu, avec une vaste lassitude face à la variation ou le flottement. Elle s’avance, se retire, simplement. Le regard se pose parfois sur une mer morne, ennuyante ; une mer qu’il souhaite morne, ennuyante.
C'est quand ce dernier point de vue se condense en une impression fausse qu'on entrevoit à nouveau, voit, qu'on devine sans inventer. Dans le fond comme en surface s’ancre quelque chose d’étrange et d’animal ; ponctué par une sorte de retenue aquatique qui enveloppe la mer toute entière. Ces esquisses de soulèvements échoués, ces élancements toujours effondrés, nous laisse saisir l’expression d’une réserve, un ressenti des éléments marins qui signifient perpétuellement le recul.
Mais on voit, on voit et l’on s’avance. Notre songe, rompu en surface, s’initie et s’immisce sous le visible. Dans chacun de ses élans avortés la mer manifeste le désir aussitôt réprimé de montrer, de révéler, de se montrer. C’est cela. Elle souhaite nous donner à voir, à savoir, fugacement ce qui est là, dessous, dans ses dessous, au cœur d’elle-même, dans ce qui palpite, vibre et respire, ce qui est vie multiple entrelacée, toujours prête à bouger, à se balancer et à danser au rythme aérien de la lune.
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La mer invente dans un souffle, une marée d’eaux mêlées aux vertus amniotiques. Là, dans un accès de sensibilité, il pleut des formes élaborées. C’est là qu’elle crée, du vivant, des points de commencement et de départ, des germes de plantes et d’animaux. C’est là que nous voyons dans un flottement d’œil cerné de vue liquide, l’apparition d’organes, de peaux, de feuilles et d’écailles. Esquisses d’animaux, matières animales, la mer essaie, tente, gomme et recommence. Apparitions, disparitions, montrer, cacher, oublier, recommencer. Là une peau d’éléphant, une feuille de choux, un profil de tortue étoilé. Là un délire d’œil écumant sa paupière, un sexe aspirant par ses atomes d’iode.
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